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La hulotte

 

          Je lis attentivement, dans des revues, la description de ce sympathique oiseau nocturne. Il est toujours fait mention de ses grands yeux noirs pour désigner ceux-ci. Or, j’ai connu, autrefois un petit oiseau qui possédait beaucoup de caractéristiques différentes de ceux mentionnés concernant la hulotte.Chouette hulotte (Strix aluco / Tawny Owl) 2006-03-23

 

           J’ai très longtemps habité une ferme isolée où on avait tout loisir d’observer la flore et surtout la faune que l’on était amené à côtoyer journellement.

 

          Comme toute demeure de campagne qui se respecte, cette ferme possédait son potager qui, en même temps tenait lieu de jardin d’agrément. C’était, bien sûr mon rôle de l’entretenir.

 Ce jardin, contigu aux bâtiments, longeait un imposant pignon de grange que les intempéries avaient depuis longtemps, grignoté l’enduit laissant apparaître les pierres meulières, formant l’ensemble de la construction. Entre ces pierres s’étaient formées des cavités, aidées en cela par différents oiseaux : moineaux, mésanges et, ce qu’on appelait des chouettes. Cet oiseau, peu farouche, passait des heures sur le faîtage de la grange et je me suis toujours demandé que, vu que son activité était nocturne, à quel moment la chouette  pouvait dormir. A moins que cet endroit ne fut, tout simplement son dortoir.

 

          Du jardin, on pouvait l’observer sans qu’elle fût à aucun moment effrayée. Lorsqu’elle quittait son perchoir, elle « glissait » sans bruit vers un arbre sur lequel, elle restait des heures, là aussi. Elle n’était jamais très loin. Cet oiseau se complaisait en compagnie de l’homme.

           

          Cet oiseau au plumage soyeux, plus clair, que la plupart des rapaces en général, atteignait difficilement quinze centimètres. Sa queue était très courte et de sa tête bien ronde comme celle des rapaces nocturnes, dépassait à peine son bec crochu, mais le plus étonnant étaient ses yeux. Contrairement à l’ensemble des oiseaux de cette espèce qui ont les yeux noirs, les yeux de notre hulotte étaient naturellement bien ronds et avaient la particularité d’être…bleus. Un bleu azur et très lumineux que je n’ai jamais remarqué chez aucun autre animal.

Lorsqu’elle tournait la tête vers un animal ou une personne, elle le faisait avec un mouvement vertical comme si, celui-ci était commandé par un ressort.

 

          Elle nichait dans une des cavités dont ce mur de grange était truffé. Elle ne nichait jamais deux années de suite dans le même trou. Une fois, je découvris un petit tombé du nid, celui-ci n’étant pas très haut, je remis l’oisillon dedans. J’appris par la suite que j’avais fait une chose qu’il ne faut jamais faire : un petit touché par la main de l’homme est automatiquement rejeté par sa mère. Je n’ai donc pas été étonnée de retrouver, le lendemain, la petite hulotte, morte à l’endroit où je l’avais ramassée.

 

          Quand nous avons quitté la ferme, il y avait beau temps que nous n’entendions plus les soirs d’été, à la nuit tombante, le Houou !poussé doucement à intervalles réguliers. Elle avait un autre cri, impatient, celui-là, lorsqu’elle voyait un chat dans les parages.   

 

 

           Ces hulottes ont disparu certainement victimes du terrible autour des palombes qui faisait des dégâts dans la basse-cour en cette période. La chouette ne couvant qu’une fois dans l’année et les couvées ne comportant que deux petits, l’espèce était forcément menacée.

 

            Les dépendances de la ferme étaient aussi hantées par une autre chouette,effraie celle-là. Contrairement à la hulotte, l’effraie séjournait à l’intérieur des bâtiments, sur une poutre. L’effraie, par contre, avait toujours l’air de dormir. Lorsqu’on la dérangeait, elle tournait sa face blanche, en forme de cœur, vers l’intrus et on pouvait remarquer ses yeux réduits à une simple fente. Ces fentes étaient écartées vers le haut de la tête et se rapprochaient en descendant vers le bec. Contrairement à la hulotte, elle ne se laissait jamais observer bien longtemps. Elle disparaissait aussi rapidement que silencieusement.

 

            Certains jours, si on ne la voyait pas, on découvrait des traces de son passage sous forme de pelotes d’os et de poils provenant des petits rongeurs attrapés et dévorés dans la nuit, qu’elle avait régurgités, ces éléments étant indigestes. 

                                       

 

 

 

            2007 / 01 / 18  A.D.